Irma, Pedro, Katia… les ouragans se suivent, détruisent tout sur leur passage. « Tout » n’a malheureusement pas la même signification pour tout le monde. A St Barth, les hôtels de luxe seront reconstruits tandis qu’ils seront nombreux à vivre durablement dans la précarité.
Les sceptiques se rendent compte aujourd’hui des conséquences de l’échauffement politique des présidentielles. Après 100 jours, les sondages montrent qu’il n’est plus besoin d’être un expert pour prévoir la trajectoire de l’ouragan Emmanuel.
Et baisse des APL de 5 euros et réforme de l’ISF, et hausse de la CSG et allègement de la taxation des revenus du capital, et suppression de la Taxe d’habitation et baisse des dotations des collectivités territoriales. Une trajectoire « et de droite et de gauche », entendez : « et libérale et libérale ». L’OFCE, l’Observatoire Français des Conjonctures Economiques, estime que ce sont les « 10% des français les plus aisés » qui vont concentrer 46% des baisses d’impôt. L’orbite jupitérienne tourne autour de l’astre Capital.
Les macronomics ne se nourrissent pas que de politique fiscale… il leur faut s’attaquer au droit du travail pour faire mieux que El Khomri, mieux que Schröder, mieux que Thatcher… il leur faut une loi pour faciliter les licenciements, pour faire travailler plus pour moins cher, pour réduire les capacités d’expression et de défense des salariés, pour laminer les droits conquis par les salariés dans les conventions collectives.
Les macromaniaques se vantent : « Le dialogue social, ça marche ! » peut on lire sur le site du ministère du travail. Il donne « des exemples sur le terrain » d’accords d’entreprise « bénéfiques à tous », disent-ils, « salariés comme chefs d’entreprise ». On peut lire celui d’une entreprise de menuiserie métallique dans le Maine-et-Loire qui, je cite : « améliore la qualité de vie au travail grâce au dialogue social ». Cette entreprise a, je cite toujours : « négocié plusieurs accords mettant en place un indicateur de bien-être au travail ». Conséquence pour les salariés. Je cite encore : « L’entreprise a pu supporter un pic de production important qui nécessitait de travailler le week-end ». Pour le ministère du travail, améliorer la qualité de vie, c’est travailler le week-end ! Faut-il attendre mieux de la part d’une ministre ancienne DRH de Danone, qui, de plus, a touché plus d’un million de stock-options en plein plan social.
Macron aurait mis de l’eau dans son vin, l’accord de branche serait renforcé analysent certains… mais c’est au détriment de la loi ! L’objectif des ordonnances est aussi de réduire le nombre de branches, autant d’occasion de revenir sur ce qu’elles ont construit. Il n’y a rien à attendre de cette loi pour les salariés, les privés d’emploi et les jeunes. Rien n’est bon dans le Macron ! Il l’a dit « Je ne suis pas là pour défendre les jobs existants ». Schumpetérien, il ose penser « destruction créatrice »… il n’a qu’une vision : la France entière comme une start up.
Il s’attaquera aux principes d’emploi public. Les trois versants de la fonction publique sont dans le collimateur du gouvernement, comme les régimes spéciaux hérités du droit public du travail.
Il s’attaquera à la protection sociale pour en finir avec le système né du Conseil national de la Résistance.
Le MEDEF en rêvait, Macron le fait.
Pour terminer, je tiens à m’excuser d’avance pour mes références musicales qui ont l’âge de mes artères mais je ne voudrais pas dans le proche avenir où ma fille sera sur le marché du travail, expression cyniquement capitaliste pourtant utilisé par Pôle-Emploi, je n’aimerai pas devoir écrire à la manière d’Hubert-Félix Thiefaine, un « exercice avec 33 fois le mot coupable ». Je ne veux pas me sentir coupable par laisser-faire, coupable par abandon par jet de l’éponge, coupable par inadvertance, coupable par négociationisme, coupable par stratégie syndicale… Je vous épargne les 28 suivants. Sans provocation, je clame, à défaut de pouvoir le chanter, c’est ensemble, tous ensemble que nous avons une chance d’arrêter la marche de l’économiquement correct et de ses valets politiciens qui entendent concasser les droits des travailleurs. Le code du travail n’est pas un outil pour lutter contre le chômage. Le droit du travail n’est pas un droit des entreprises. À l’origine, le droit du travail a pour vocation de s’opposer aux appétits démesurés des patrons voyous. En 1906, lors de la catastrophe de Courrières, quand un coup de grisou a fait plus de 1 000 morts dans une mine de charbon, le patron a refusé de faire rechercher les survivants et a ordonné la reprise du travail dès le lendemain. Quelques jours plus tard, une dizaine de rescapés seront retrouvés. C’est à ce moment, que le ministère du Travail est créé et séparé du ministère de l’Économie, pour résister à des patrons de ce type. Le code du travail naît en 1910, il est donc une résistance légale, morale, juridique, politique, humaine à ce qu’exigent les entreprises.
Le code du travail, ensemble, tous ensemble, nous serons coupables si nous ne le défendons pas… dans la rue… jusqu’au bout.
Erick LERMUSIAUX