« 100 jours d’apaisement » : c’est raté, on est là !

Ce 1er mai, journée internationale des travailleur·euses instaurée en mémoire des ouvriers états-uniens qui au prix d’un combat long et meurtrier obtinrent le passage aux huit heures dans les entreprises, s’inscrit dans un mouvement social inédit commencé en janvier dernier. À l’appel d’une intersyndicale à huit et sur la base du mot d’ordre unitaire : retrait de la loi Macron sur les retraites, il a mobilisé partout dans le pays des millions de personnes, salarié·es, retraité·es, étudiant·es, lycéen·nes, citoyen·nes, toutes et tous uni·es dans une confiance collective et une détermination à gagner. La réponse à ce mouvement d’ampleur inédit a été le déni, le mépris, les déplacements à l’étranger, le boycott du débat parlementaire, le 49.3 et la répression policière sous tous ses aspects (arrestations arbitraires, mutilations, provocations, …). Si la loi a été finalement promulguée après l’appui du conseil constitutionnel, la mobilisation se poursuit sous des formes variées : casserolades et accompagnements musicaux des ministres en déplacement, grèves comme à l’entreprise Manitou à Ancenis, blocages, boycotts des réunions ministérielles … Le gouvernement aurait tort de croire que la bataille est finie. La population refuse toujours majoritairement cette loi et soutient les syndicats dans leur démarche d’opposition à des politiques d’acharnement antisocial. Et partout ça débat !

Sur toutes les questions qui nous importent : la retraite, le travail, le service public, l’éducation, la santé, la démocratie, l’urgence climatique… Plus ça débat et plus deviennent insupportables les politiques d’engraissement du capital au détriment du travail, l’accaparement des richesses, les inégalités, la marchandisation de l’énergie, de l’éducation et de la santé, la militarisation de la police, les atteintes aux libertés… Les masques tombent. Le pouvoir se moque de l’intérêt général. Il se moque de la démocratie. Le voilà qui menace les défenseurs des droits, qui agite les spectres du « terrorisme intellectuel de gauche » ou de « l’écoterrorisme » pour justifier sa violence, et qui se paie le ridicule d’interdire « les dispositifs sonores portatifs ».

Ensemble, nous avons construit ce mouvement social « hors normes » qui n’a pas dit son dernier mot. Hors normes par sa durée, par ses formes, par sa géographie, débordant de nouveaux engagements, et largement soutenu à l’international. Fort de son unité, de sa diversité, de sa détermination et de sa joie !… Il prouve notre attachement profond aux conquis sociaux. Il dit notre refus de consacrer sa vie entière au travail. Il dit notre refus du « tout est marchandise ». Il questionne la légitimité politique d’un président qui veut transformer la France en « start-up nation » à coup de 49.3 et par la répression des manifestations comme à Sainte-Soline où plus de 200 personnes ont été blessées dans un déluge de grenades.

À l’Assemblée nationale, un projet d’abrogation de la loi est posé pour le mois de juin. Rien n’est encore joué ! La FSU appelle à continuer la mobilisation sous toutes ses formes y compris par la grève pour maintenir la pression sur le gouvernement Borne. Les 100 jours proclamés par un Emmanuel Macron, se rêvant un destin impérial mais se rapprochant toujours plus de Waterloo, sont autant d’occasions pour proposer une alternative sociale et politique à ce libéralisme autoritaire. Le syndicalisme de transformation sociale, porté par la FSU, revendique un réel partage des richesses, le renforcement des droits des salarié·es et des retraité·es, la retraite à 60 ans avec 37.5 annuités, le renforcement des services publics sur l’ensemble des territoires, la lutte contre les emplois précaires, le tout s’inscrivant dans des logiques écologique, féministe, émancipatrice. Alors que l’écart des salaires ne cesse de croître, les annonces incantatoires d’Elisabeth Borne aux entreprises pour qu’elles ouvrent des négociations salariales, sont bien la preuve du refus de ce gouvernement de réduire les inégalités sociales. Si ce dernier souhaitait réellement œuvrer dans ce sens, il augmenterait immédiatement le point d’indice des fonctionnaires pour lutter contre une inflation toujours plus grande. On en est loin quand on voit qu’à l’éducation nationale, les augmentations de salaires sont réduites à des hausses indemnitaires bien loin du plan de rattrapage salarial compensant les pertes des vingt dernières années.

Le mouvement social sur les retraites a montré que le syndicalisme est incontournable pour faire entendre la voix des millions des travailleur·euses des secteurs public et privé. L’unité syndicale est un réel moteur de la mobilisation, même si des divergences existent sur les alternatives à mener face aux politiques de régressions sociales que nous connaissons depuis trop longtemps. Mais, il est de notre responsabilité syndicale de travailler les convergences sur des mots d’ordre porteurs. Les salaires et leur nécessaire augmentation pourraient être notre prochaine bataille commune. La FSU portera, dans l’intersyndicale, cette proposition.

Ce 1er mai est unitaire, massif, populaire et combatif. Sa réussite est un signal fort pour continuer le combat pour le retrait, pour nos revendications, pour les libertés, pour la paix… et pour ouvrir ensemble un autre horizon que l’arrivée au pouvoir de la-fille-à-son père que le président du MEDEF qualifiait, sur France Info il y a un mois, de « risque nécessaire » parce qu’il sait bien qu’elle servirait, elle aussi, les grandes fortunes et les grands patrons…

Bon 1er mai à toutes et à tous.

Céline Pella et Bernard Valin