La crise sanitaire et sociale que nous vivons depuis 6 mois et les dysfonctionnements et manquements qu’elle a mis à jour pouvait laisser espérer un rebond, une prise de conscience de là où les efforts des politiques publiques devaient se porter. Comme dans les très récentes découvertes scientifiques à propos de l’atmosphère de la planète Vénus, une analyse fine de l’état gazeux pouvait laisser espérer des traces de vie…et d’humanité. Le plan de relance qui nous a été présenté vient malheureusement confirmer ce que nous craignions : c’est le tout économique et le tout au marché, la perpétuation des cadeaux aux plus puissant·es, et l’abandon décomplexé du devoir public de protection des citoyen·nes, et parmi elles et eux des plus fragilisé·es par les orientations politiques sciemment choisies depuis des décennies.

A rebours d’un réchauffement climatique avéré, ce qui se joue est bien de l’ordre de la glaciation : le régalien, le marché, l’argent. Les urgences en matière de climat, de santé, de protection sociale, d’éducation, d’emploi et de salaire, et les moyens publics qui doivent aller avec dans un souci d’anticipation sur le long terme, sont les grandes oubliées. Pourtant cette crise aura permis de vérifier l’absolu nécessité des services publics qui, malgré leurs difficultés structurelles liées aux abandons politiques, ont servi d’amortisseur social et ont fait tourner le pays.

Et pourtant…Rien pour les relever, rien pour leur donner la place et les moyens que ces services méritent, rien à part des prêches dans le vent médiatique. Les obsessions présidentielles demeurent quant à leur mise en vente ou à leur renvoi aux gestions localisées, et chaque décision semble être un pas de plus pour les mettre à terre. La loi de transformation de la fonction publique rime avec précarisation, individualisation et donc isolement des agent·es ; la loi dite 3D pour Décentralisation, Différenciation et Déconcentration rime avec mise en concurrence des territoires et pouvoir accru des préfet·es. La manière dont le gouvernement demande à chaque territoire de gérer la Covid 19 en cette rentrée en est la parfaite et affligeante illustration, entraînant flou et disparité dans les conduites à tenir.

Nous sommes entré·es en période électorale : élections régionales et départementales en 2021, et en horizon la Présidentielle, alpha & oméga de toute politique. Hors de question donc de travailler sur le fond, surtout quand il s’agit de social et d’éducation. La réforme de retraite est au coin de la porte : le cap macronien n’a pas changé et le projet ressortira avant la fin du quinquennat. Pourtant la crise a confirmé un de nos principaux arguments : le plafonnement des dépenses de retraite à 14 % du PIB aurait eu, avec une chute de la croissance d’environ 11 points, des conséquences catastrophiques sur le niveau des pensions et donc sur les conditions de vie des retraité·es.

Alors même que notre département connaît et va continuer de connaître des licenciements en nombre, en particulier dans les secteurs aériens et aéronautiques, dans ceux du commerce, de la restauration et de la culture, la réforme de l’assurance chômage, suspendue mais pas supprimée, va être également ressortie du chapeau. En réduisant la protection des chômeurs et des chômeuses, elle va impacter durement celles et ceux-là même qui ont été au premier rang pendant la crise : les travailleurs et travailleuses les moins bien payé·es et les précaires, qui sont le plus souvent des travailleusEs et des jeunes. Les 100 milliards d’euros offerts sans contrepartie aux entreprises fait tomber les masques : le déficit public n’existe plus quand il s’agit de préserver les dividendes.

S’il a été difficile de se mobiliser en cette rentrée particulière, en particulier dans le secteur de l’éducation baladé entre approximations et rattrapages, la situation que nous traversons donne au mouvement social une grande responsabilité : celle d’imposer des réponses progressistes, humanistes et justes, notamment en exigeant que les questions de salaires, d’emploi et d’intérêt général soient le cœur des politiques publiques. La mise en place récente d’un comité local « Plus jamais ça » en Loire Atlantique pourra être, nous l’espérons, un lieu de constructions d’analyses et d’alternatives sur les enjeux, parfois contradictoires, liant les questions salariales, économiques, sociales et écologiques sur notre territoire. Cet effort de compréhension et de synthèse est nécessaire pour construire un rapport de force argumenté et prenant en compte cette diversité des enjeux.

Catherine TUCHAIS et Bernard VALIN