Camarades, c’est vous qui écrivez notre histoire !

Demain est déjà là monsieur Macron, il est temps de « tirer les leçons du moment que nous traversons » comme vous le déclariez le 12 mars 2020. La pandémie révèle aujourd’hui de manière tragique les failles d’hier. Aucun protocole sanitaire n’est en mesure de les colmater.

Un exemple : l’école. Pour cette rentrée, fier monsieur Blanquer annonce des modalités renforcées. Les élèves ne seront plus brassés, même en cas d’absence de professeur·e. Mais la réalité est têtue. Faute d’avoir investi en personnels depuis des années, il n’y aura pas plus d’enseignant·es remplaçant·es en mai qu’en avril pour accueillir les élèves, alors l’Éducation Nationale imagine que les AESH délaisseront les élèves qu’ils accompagnent pour garder la classe, elle imagine qu’on peut faire appel aux jeunes sans aucune formation, ni expérience que sont les services civiques, ou plus simplement, comme le ministre l’a déjà déclaré à propos de la cantine, les familles n’ont qu’à se débrouiller. Le gouvernement annonce des tests pour les élèves. Mais la réalité s’obstine. Dans les écoles primaires, il n’y a que des enseignant·es, des ATSEM, des AESH, occupé·es à plein temps par les tâches éducatives. Dans les collèges et les lycées, la réalité bégaye, l’infirmier·e suit 1 500 élèves sur 2, 3 établissements et n’a pas le don d’ubiquité.
Aujourd’hui l’école n’est pas sûre parce qu’hier, elle était sous le joug du dogme de l’austérité, comme la santé, comme tous les services publics, comme partout ailleurs.

L’école comme exemple parce que c’était mon métier. Mais ils sont nombreux tous ceux qui peuvent témoigner des dysfonctionnements de l’actuelle gouvernance mondiale dictée par un capitalisme néolibéral et productiviste.
L’artisan anglais qui doit revoir sa géographie quand il apprend que les planches de chêne français qu’il a commandées passe par le canal de Suez pour traverser la Manche.
Le footballeur danois qui doit revoir ses valeurs quand il découvre que la pelouse qatarie de la prochaine coupe du monde recouvre un immense cimetière de Pakistanais, Bangladeshi, Népalais et Kényans.
Le fils indien qui tient la main à son parent mourant sur le trottoir devant l’hôpital alors qu’il vit près d’une usine qui pourrait produire des vaccins.

Et si pour être sérieux, il fallait des chiffres plutôt que des vies. Alors retenons ceux-ci : entre mars 2020 et mars 2021, la fortune des milliardaires français a augmenté de 170 milliards, soit une hausse de 40 %. Pendant ce temps, de l’autre côté de la rue, le Secours Populaire a accueilli 30 % de bénéficiaires supplémentaires. En septembre, 8 millions de personnes avaient besoin d’une aide alimentaire contre 5,5 millions un an auparavant.

Un temps, un temps très court, le temps d’un discours, on aurait pu croire que le président Macron avait compris. Le 12 mars 2020, il déclarait : « Ce que révèle d’ores et déjà cette pandémie, c’est que la santé gratuite sans condition de revenu, de parcours ou profession, notre État-providence ne sont pas des coûts ou des charges mais des biens précieux, des atouts indispensables quand le destin frappe. Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché. » Un temps, un temps seulement, un temps de sidération. Un an plus tard, Emmanuel Macron estime, il n’est pas le seul, que pour préparer le jour d’après il est surtout urgent de se préoccuper des prochaines élections. Il annonce la création de 10 000 policier·es plus rentable en nombre de voix que d’imaginer 10 000 infirmier·es dans les hôpitaux et les EHPAD, elles ne seraient utiles qu’à sauver des vies.
Lorsque dans une ville on modernise l’hôpital, c’est en supprimant des lits, 230 à Nantes.
La rentrée scolaire de septembre 2021 se fera avec moins de profs dans les collèges et les lycées alors que les élèves seront plus nombreux. Et si en Loire-Atlantique, il y aura la création d’un poste d’infirmier·e scolaire, c’est qu’il vient de Mayenne, parce que chacun sait que dans un département rural comme la Mayenne, il ne peut y avoir de cluster.
La grande distribution s’arrange pour payer 1% de moins les éleveur·euses de porc malgré la loi Egalim.
Les métallo·ttes doivent se battre pour que leur nouvelle convention ne serve d’exemple à d’autres branches en permettant aux patrons de rémunérer en fonction du poste qu’il voudra bien confier à l’ouvrier·e plutôt qu’en fonction de ses qualifications.
Pour faire de nouvelles économies, la réforme de l’assurance chômage pénalisera plus de 1,7 millions de demandeur·euses d’emploi.

Le jour d’après se prépare avec les règles du monde d’avant.

Il y a 130 ans, jour pour jour, à Foumies, des femmes, des hommes et un enfant tombaient sous les balles parce qu’ils étaient en grève et manifestaient. Ce sont pourtant des manifestant·es qui ont été condamné·es à des peines de prison ou aux travaux forcés.
Aujourd’hui, le droit de manifester, d’exprimer son opinion est toujours attaqué : à coup de décrets (sécurité intérieure) et de lois (dite de Sécurité Globale et Contre le Séparatisme, leur nouveau nom ne change rien). Le gouvernement estime que la République ne peut avoir qu’une seule voix, la sienne. Et quand ce n’est pas en légiférant, c’est par un licenciement honteusement abusif, comme c’est le cas localement pour Christel Husson, que nos libertés fondamentales sont mises au pas.

Ce 1er mai, nous manifestons pour clamer : « Plus jamais ça ! »

Plus jamais d’hôpitaux débordés, plus jamais d’EHPAD délaissés, plus jamais de services publics exsangues, plus jamais de travailleurs mis en concurrence et appauvris, plus jamais de personnes sans revenu et en précarité alimentaire, plus jamais un étudiant qui se suicide… plus jamais ça !

Une sortie de crise ne se fera pas avec les recettes du monde d’avant qui ne satisfont que les appétits du grand patronat et des finances mais avec nos objectifs :
– garantir à toutes et tous les mesures de protection et de prévention ;
– assurer les sécurités sanitaire et sociale en renforçant les droits démocratiques et individuels ;
– répondre à la crise sociale ici mais aussi ailleurs sur la planète ;
– reprendre le contrôle sur le monde de la finance et la dette publique ;
– imposer plus de justice fiscale ;
– accompagner durablement la reconversion écologique ;
– transformer nos modes de productions, de mobilités et de consommation.

Mais il ne suffira pas de le clamer sur cette place, camarades, nous qui sommes ici avec drapeaux, convictions et détermination, nous serons inutiles si nous ne le répétons pas à celles et ceux qui ne sont pas là : à cette femme seule qui élève ses enfants avec un salaire à temps partiel contraint, aux possesseurs d’une carte d’invalidité qui trouvent peut-être une place de parking mais à qui on ne réserve pas de postes adaptés sur le marché du travail, au salarié de 58 ans qui s’entend dire qu’il est trop vieux pour travailler mais beaucoup, beaucoup trop jeune pour penser à la retraite, à cette retraitée qui constate amèrement que sa pension est inférieure au seuil de pauvreté, à l’étudiant qui s’interroge s’il ne devrait pas contracter un emprunt sur 20 ans pour continuer ses études… à toutes ces personnes qui s’échinent à survivre et qui n’ont plus la force de lever le poing.

Parce que nous sommes en 2021, parce que vous le savez depuis le début, je reste instit, j’emprunte les mots de Prévert pour commémorer la commune :

A l’école on nous a raconté des histoire
L’histoire de France
Il était une fois un roi et une reine
Ralliez-vous à mon panache blanc
Du haut de ces pyramides quarante siècles vous contemplent
J’y suis, j’y reste
(…)
Notre histoire à nous
Ce sont les jacqueries, les communes
Nos paroles historiques
Les mots d’ordre du prolétariat
Nos batailles
Les grèves, les insurrections
Nos défaites
Les répressions
Notre histoire à nous
Apprenons notre histoire, camarades
Il était une fois une grande ville
Paris !
Dans cette ville, un peuple d’exploités !
Le prolétariat parisien
En mai 1871, première grande victoire du prolétariat
La Commune de Paris
Camarades, c’est vous qui écrivez notre histoire

Camarades, aujourd’hui comme hier, c’est vous qui écrivez notre histoire !

Erick LERMUSIAUX