Une mauvaise loi, ça s’abroge !
Sous la plage, les pavés ! Des pavés que nous continuerons de lancer dans la mare aux grenouilles, une mare où plus personne ne distingue les grenouilles des crapauds, des pavés qui éclabousseront les 127 décrets à venir de la loi El Khomri, des pavés qui entâcheront les deux prochaines années de sa mise en place. Laisser s’installer la loi contre le travail, c’est laisser préparer sur l’échiquier de la déréglementation le coup d’après : le statut de la fonction publique. C’est laisser s’aggraver la situation que vivent les millions de salariés, de retraités, de privés d’emploi qui subissent la politique d’austérité.
Vous ne le savez peut-être pas mais le président Hollande a réussi à inverser une courbe au cours de ce quinquennat ! Malheureusement pour nous, c’est la courbe du taux de pauvreté. En baisse depuis 2011, elle s’inverse en 2014 pour passer de 14 à 14,1 % et atteindre 8,8 millions de pauvres en France, soit 1 million de pauvres de plus en 10 ans. Valls vient de s’en rendre compte ! Et vous savez qui sont les pauvres en France ? La moitié ont moins de 30 ans, les jeunes. Plus de 53 % sont des femmes… Les jeunes, les femmes, celles et ceux qui seront le plus impactés par le nouveau code du travail Hollando-Vallsien. Comme vous, je ne suis ni économiste, ni statisticien, je ne veux pas plus être la grenouille qui grimpe sur son échelle pour prédire l’avenir… mais à formater ainsi la société française avec le logiciel qui érige le dumping social en principe, le parti social libéral au pouvoir atteindra son objectif de s’approcher du sacro-saint modèle allemand, le pays au chômage à 6 %, bien inférieur au nôtre, mais au taux de pauvreté supérieur, à 17 %, un pays qui en 10 ans a vu plus que doubler son taux de travailleurs pauvres. Ce ne sont pas que les chômeurs qui sont touchés par la pauvreté, elles sont de plus en plus nombreuses les personnes actives à ne pas gagner assez pour se hisser au-dessus du seuil de pauvreté. La loi El Khomri sera aussi la loi des travailleurs pauvres.
Elle se voulait être celle de l’emploi. « La loi Travail favorisera les embauches, notamment en CDI. » n’a cessé de répéter le gouvernement. Il n’y a pas que ces, entre guillemets, ringards de syndicalistes à ne pas y croire, un sondage auprès de DRH révèle qu’ils sont 85 % à estimer qu’elle ne changera rien en terme d’embauches. À propos d’emploi, les à peine hasards de l’actualité mettent en lumière ce que la loi permet de mettre en exécution encore plus facilement. Alstom considère qu’un de ses sites est non rentable et de trop : on ferme ! Les actionnaires peuvent dormir tranquilles pendant qu’à Belfort, 500 salariés devront s’échiner à se reclasser.
Abroger la loi travail est une mission de service public. Les fonctionnaires devraient s’en imprégner. Car partout des signaux apparaissent pour dégrader le temps de travail, donner toujours plus de pouvoir de décision à l’encadrement de proximité pour déconcentrer la gestion. Le renversement de la hiérarchie des normes ça n’arrive pas qu’aux autres ! L’Etat employeur, l’hôpital et les collectivités vont pouvoir se régaler des reculs du privé. Partout ça craque. Dans le privé on rêve d’augmenter les cadences, à l’hôpital on y soumet les infirmières, à Jeunesse et Sports on détériore les taux d’encadrement des rythmes scolaires pour faire baisser le coût du travail des communes ou de leurs sous traitants.
Nous sommes là aujourd’hui comme hier, nous serons encore là demain. Nous serons là ensemble, en intersyndicale, parce que le sens de nos luttes est notre boussole et que notre opposition commune au projet du gouvernement était et demeure sans faille entre nous. Nous répétons à ce gouvernement qu’un mauvais projet de loi devient une mauvaise loi. Une mauvaise loi, ça s’abroge. Une mauvaise politique, ça se combat avec toutes les armes imaginables. Un mouvement social n’a pas de saison. Né au printemps, nourri en été, il ne s’éteindra pas en automne et l’hiver n’en viendra pas à bout.
Erick LERMUSIAUX