Salariés modernes, privés d’emploi modernes, étudiants modernes : dormez tranquilles au pays du MEDEF et de la CFDT ! Les accords gagnants-perdants veillent sur vous ! Y’a pas longtemps, sous Disneyland, on nous disait travaillez plus pour gagner plus. Mais avec le changement, maintenant, c’est plus pareil : un accord a été signé pour gagner moins sans se faire virer… ou être viré ! Fallait le faire ! Mais en temps de crise on peut tout faire pour faire plaisir aux actionnaires.
En période d’austérité, un syndicaliste responsable vous dira : pour sauver la compétitivité le Code du Travail il faut oublier. Pour un gouvernement, responsable lui aussi, ce syndicalisme ami-ami c’est du pain béni. En temps de crise, au pays des sans culottes, on peut bien partager sa chemise par petits bouts, en la donnant aux actionnaires. Un syndicalisme moderne, c’est comme un parti de gauche moderne, ça sait composer avec l’ordre totalitaire mondialisé. L’accord du 11 janvier est entièrement soumis à cette doxa du nouveau modèle économique. Il transcende les politiques de gauche en politiques de droite. Au pays inchangé de Sarkoland, y’a pas de changement : les riches sont riches, les pauvres sont pauvres. Les fausses avancées signées par le syndicalisme d’accompagnement le 11 janvier ne sont que trompe-l’œil qui organise des reculs voulus par le patronat. La braderie du Code du Travail continue.
Avec près de 20 millions de chômeurs officiels, la zone euro est engluée dans la baisse doctrinaire du coût du travail et des dépenses publiques. L’austérité mécanique freine l’activité économique, appauvrit les populations, comprime les recettes fiscales. L’avenir des peuples est irradié par la compétition des profits. L’ordre économique aux mains des actionnaires ne fait qu’accoucher de nouveaux tours de vis sur les services publics, la santé, les retraites et les solidarités.
Il paraît qu’en syndicalisme de salariés, c’est comme en sport, on ne fait pas de politique ! Quelle ânerie cette fausse autonomie ! Défendre les droits des salariés ou les brader par proximité politicienne ou partage de valeurs patronales ce n’est pas « politique », ça ? En syndicalisme, pour ne pas être blaireau, il faut être capable d’analyser LE politique. Exemple : François Hollande évoque le rapprochement de l’Europe et de la France avec l’économie américaine. Ne pas entrevoir que derrière ce marché rapproché cela expose directement nos droits sociaux, serait une preuve de grande naïveté ou de complicité. Idem quand les technocrates multicartes qui sévissent à Bruxelles et dans nos ministères avouent qu’il faut construire des droits sociaux européens complémentaires à ceux des pays. Dans un premier temps, les salariés auront à choisir de cotiser ou non au droit européen qui deviendra un jour le seul en activité au grand bénéfice des fonds de pensions et des marchés spéculatifs.
La crise actuelle sert à avancer ces nouvelles étapes pour imposer la construction d’un modèle économique mondial doctrinaire, destructeur pour la planète et l’humanité. Les signataires du 11 janvier ne sont ni des imbéciles, ni des innocents ne voyant qu’à court terme. Ils font dans LE politique. Ils agissent directement sur le débat de société. La classe ouvrière, les salariés, sont malheureusement très et trop divisés. Derrière nos divisions, c’est un débat politique au sens large qui se joue car c’est tout notre projet de société. Manifestement il nous faut gagner les combats d’opinion si nous voulons faire comprendre à ce gouvernement qu’il n’a pas été élu pour mener une politique économique identique à celle de son prédécesseur. Si demain, le gouvernement va là où Sarkozy n’a pas osé aller, il nous faudra dans l’unité la plus large, entre syndicats indépendants, lui rappeler et lui imposer les fondamentaux qu’il trahit.
Didier HUDE