Le jour où c’est avec des sourires qu’on désarmera des hommes de guerre, alors, peut-être viendra le jour où des intersyndicales édentées feront peur aux puissants rien qu’en leur grognant aux mollets. Je sais. Il n’est pas syndicalement correct de se flageller en public. Cela pourrait même désespérer le populo. Or aujourd’hui c’est le 1er mai, la fête syndicale, le jour cotillon des revendications ! Alors camarades embrassons-nous ! Non ! Nos journées de grève isolées ne sont pas sans perspectives. Elles ne sont pas le soleil noir de nos mélancolies. Au contraire ! Dans nos cortèges en marche, le ciel changeant de nos visages témoigne de notre capacité à faire trembler l’oppression. T’vas voir ta gueule à la rentrée !

Nos voix voraces dans les micros traduisent l’audace de bonnes plates-formes unitaires dont les restes ne rejoindront jamais le rayon des surgelés. Tout comme la fleur tient à sa tige, la FSU tient – et ce n’est pas contre toute raison – au mouvement que nous incarnons. Voilà ! Il fallait le faire, c’est dit.

En attendant les Godot syndicaux : le petit Nico, Dame Parisot s’aiment d’amour tendre, ils savent bien s’y prendre, jouent au culbuto, des acquis sociaux.

Il nous faudra un autre niveau de mobilisation et d’action pour mettre en échec le gouvernement patronal qui n’entend rien sur les retraites, comme sur les autres sujets. Moraliser le capitalisme est un leurre autant qu’une vision politique endimanchée, recentrée, ayant la cataracte. Renouer avec une pensée exigeante qui sait lire le dessous des cartes est indispensable. Les analyses molles, les concessions aux pensées de méduses qui ne questionnent pas le diktat des marchés, sont mortifères pour les droits sociaux. On le voit partout, en Grèce, au Portugal, en Asie, en Amérique latine, en Afrique en tout premier lieu, partout les marchés jouent contre les peuples. Les agences autoproclamées de notation des politiques économiques des Etats sont de véritables milices privées qui témoignent d’un stade extrême de destruction des hommes et de la planète par la puissance de l’argent. Nous sommes en pleine barbarie financière. Le nouveau combat à venir sur les retraites relève du conflit généralisé sur la redistribution des richesses où les peuples payent l’addition. On va jusqu’à évoquer en Grèce, en 2010, la suppression des congés payés !

Nos pays deviennent durs et froids comme des pierres. Les étrangers deviennent partout indésirables. En ce jour emblématique de solidarités internationales, alors que de sinistres ministres sonnent le tocsin de l’identité nationale comment oublier, derrière le sans papiers, la traite des peuples et de l’humanité souvent organisée. Comment oublier Irina la Roumaine ou bien la Congolaise, prostituées dans nos rues. Comment oublier Issa le Malien ou le Tchadien, exploités dans leurs boîtes de sécurité ? Comment oublier les millions d’enfants asservis, esclaves mis au travail, vendus parfois par leurs familles, privés de tout, privés d’humanité. Comment oublier ? Quand on voit comment ces drames sont traités, comment ils sont exploités dans nos pays riches, recyclés dans des ministères de l’identité. Il y a devoir à se sentir étranger. Etranger à son pays lorsqu’il flatte la bassesse et qu’il met ses valeurs à la cave du cœur et de l’intelligence.

Nous avons besoin d’unité pour changer le cours de nos vies. Et en même temps nous avons besoin de plus grande conscience pour enrayer les entreprises d’atomisation d’où qu’elles viennent, l’exacerbation des communautarismes. Le syndicalisme doit penser plus haut pour construire la riposte et oeuvrer au changement.

Nantes le 1ermai 2010
Didier HUDE