La crise sanitaire oblige au respect de mesures de protection afin de contenir la propagation du virus covid-19. Elle met aussi en évidence les points de faiblesses de notre système sanitaire et social engendrés par des politiques qui se suivent entraînant la fermeture de lits d’hôpitaux et les suppressions d’emplois de soignant·es. De nouveaux déserts médicaux ou saturations d’accès aux soins sont vérifiables et fréquents sur la région des Pays de la Loire. Pour tenter d’éviter l’engorgement du service public de santé, les mesures barrière contre la propagation du covid-19 sont indispensables, mais ne peuvent suffire.
Les éléments de langages de la Présidence et du gouvernement empruntent désormais au langage guerrier.
Mais la solidarité nationale indispensable n’a rien à voir avec l’union sacrée. L’affirmation présidentielle laissant entendre qu’il s’apprêtait à changer certaines de ses orientations doit être appréhendée avec lucidité, sans procès d’intention et sans naïveté. La crise actuelle, exceptionnelle, relève de l’urgence. Elle requiert des initiatives nationales et locales. Sa gestion ne peut demeurer verticale. La solidarité ne se décrète pas ; elle se construit. Or, à coups de circulaires, d’initiatives locales, le management administratif – loin de se concerter avec la société civile organisée – produit des injonctions dangereuses et irréalistes pour les agent.es, voire inopérantes, car seulement communicantes. C’est le cas pour les populations les plus fragiles socialement et économiquement, les sans-abri, les migrant.es, les Roms, mais encore les familles monoparentales, ou pour les conditions d’accès très inégalitaires à la continuité éducative scolaire.
Au nom du rassemblement de la Nation, le Président de la République a prononcé la suspension de toutes les réformes en cours, dont celle des retraites et du second volet de l’assurance chômage. Mais il n’a rien suspendu de l’application de la loi de transformation de la Fonction publique qui affaiblit le dialogue social, ouvre la porte aux arbitraires locaux, et veut en finir avec le statut. Il n’a rien dit de tangible sur la suspension du plan « ma santé 2022 » contre lequel les urgences sont en grève depuis plus d’un an.
La loi d’urgence sanitaire contient même des dispositions qui en disent long sur le maintien du cap gouvernemental à l’égard des agents publics. Il aura fallu attendre plus de 8 jours pour que le jour de carence dans la Fonction publique soit enfin « suspendu » et que les précomptes, déjà injustes, qui réduisent les salaires soient enfin abandonnés. On fait des personnels de santé, de sécurité et d’éducation qui assurent en présentiel leurs missions des héroïnes. Mais – dans le même temps – la loi d’urgence sanitaire prévoit une dégradation majeure du Code du travail permettant d’imposer ou modifier unilatéralement les congés payés, les RTT, les jours de repos et compte épargne temps. Les dérives sont déjà constatées. La loi les couvrira ! Et nombre de ministres préfèrent toujours les profits à la santé des salarié·es en ordonnant à des secteurs tel le bâtiment de continuer à travailler.
Ce recul des droits devrait mettre en alerte ! Les dizaines de milliards à injecter vont durablement affecter le régime de la Sécu et pas seulement le Budget de l’État, mais celui de toutes les collectivités qui déjà subissent des moyens contraints et une baisse budgétaire continue. Dans quelques mois nous ferons les comptes, tous les comptes. Comment croire que les promesses néolibérales de campagne présidentielle puissent s’évanouir par suite de cette période exceptionnelle et à un pseudo revirement idéologique ?
La crise sanitaire s’ajoute aux crises sociales, politique, économique et environnementale nationale et internationale. Les signes avant-coureurs d’une récession mondiale sont déjà présents. La crise économique mondiale, désormais inévitable, touchera obligatoirement les salarié.es comme les retraité.es et les privé.es d’emplois. Le risque est majeur de vérifier une fois de plus une posture idéologique au service de la Finance et des spéculations non pas pour pérenniser et restaurer les services publics et les grandes fonctions solidaires, mais pour ouvrir de nouveaux espaces aux fonds de pension et aux logiques de dumpings qui mettent les peuples et les économies en concurrence. Trop de signaux sont déjà là pour ne pas entrevoir les risques de salaires bloqués, de retraites encore rognées, de travail toujours plus précarisé, de monnaies d’échange soumises aux boursicotages.
Au sortir de cette crise sanitaire, les conditions d’une véritable solidarité nationale et internationale seront à réunir. Au-delà des paroles, les actes politiques et économiques seront déterminants. La FSU portera des propositions pour un tout autre projet de société que celui imposé aujourd’hui, renouant avec l’ambition actualisée des principes fondateurs du Conseil National de la Résistance. Car, si comparaison n’est pas raison, la situation le commandera pour éviter le pire avenir